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Les raisins de la douceur.

« La Vierge à la grappe », Pierre Mignard (1612-1695), 1640-1650, Musée du Louvre. Huile sur toile. Le tableau est entré avant 1710 dans les collections de Louis XIV.
Comme Le Brun, Mignard est un élève de Simon Vouet. Il part à Rome en 1636 et y reste jusqu’en 1657. Le tableau intitulé « La Vierge à la grappe » date de cette période romaine.
Le sujet classique d’une madone est ici rehaussé d’éléments iconographiques particuliers comme la grappe de raisins que tend la mère à l’enfant, préfiguration de l’Eucharistie, ou le geste esquissé par le christ qui soulève le voile de sa mère, préfigurant peut-être la Résurrection.

Le tableau s’articule entièrement autour de la figure cadrée assez serrée de la jeune mère sur un fond très sombre. Une diagonale lumineuse part du bord inférieur droit, illumine le visage de la jeune femme et de l’enfant puis remonte vers l’ouverture architecturale du coin supérieur droit. La circulation du regard se fait autour des figures au centre et converge vers la grappe. Tout : regards, gestes et lignes majeures de la composition ramènent à elle.

L’influence italienne est ici très forte. Tout d’abord dans le fort clair-obscur emprunté aux caravagesques, puis, dans l’intimité et la douceur de la scène qui rappelle les toiles de Luini (XVIe) ou du contemporain Sassoferrato et, enfin, les coloris délicats et sobres ainsi que la douce lumière qui baigne le tableau dénotent une certaine influence de la peinture vénitienne. A travers la dimension intellectuelle et morale de ce tableau par définition religieux, l’influence de Poussin se fait peut-être sentir.
Pourtant dans la perfection formelle, la grande retenue et la pointe d’affectation dont il est fait preuve, la touche se rapproche de celle des classiques français comme Vouet. Le souci apporté aux éléments tenant traditionnellement de la nature morte (fruits et tissus) marque, si ce n’est une référence, du moins une influence probable de l’art des écoles du Nord.

Mignard est célèbre pour ses tableaux de dévotion et notamment ses Madones très recherchées d’une grande beauté formelle et d’un grand raffinement (surnommées des « mignardes »).
A son retour en France, Mignard prend le parti des tenants de la couleur dans la querelle des coloris face à Le Brun. Opposition de pure forme sans doute, le style des deux peintres fortement académique ne diffère qu’assez peu. Ainsi la figure de la vierge et de l’enfant dans « Le sommeil de l’enfant Jésus » de Le Brun daté de 1655 et conservé au Musée du Louvre.

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