Science

Le mercure dans les Saules

ou comment dépolluer les sites du patrimoine industriel par phytoremédiation.

Vous êtes vous déjà demandé comment vous pouviez sans risque vous promener sur un ancien site industriel transformé en jardin ? Comment un site utilisé pendant longtemps par des professionnels en combinaison hazmat a-t-il pu être ouvert au public?

La réponse pourrait souvent tenir en quelques mots : “laissez faire les plantes!”.

La dépollution des sols est un travail difficile, écologiquement désastreux et souvent très onéreux. Les principales solutions ont pendant longtemps utilisé des traitements d’imprégnation chimiques ou des solutions mécaniques, comme le retrait des sols souillés.

Il s’est cependant avéré que des résultats encourageants étaient obtenus…en ne faisant rien de particulier pendant un assez long moment. Les résultats n’étaient cependant pas homogènes: certains sites ne se dépolluaient pas quand d’autres se décontaminaient petit à petit au grand étonnement des scientifiques en blouse blanche. D’autant que, que vous le vouliez ou non, la demi-vie de petites choses irritantes comme l’uranium 235 est tout de même de 700 millions d’années. A un ou deux mois près.

Place maintenant à nos humbles héros.

Le processus s’apparente à un syllogisme: les plantes mangent le sol, le sol est pollué donc les plantes mangent le sol pollué. En gros.

Du mercure dans votre jardin? Essayez le saule (Salix sp.).

Vieille centrale atomique encore farcie d’uranium ? Plantez donc des genévriers (Juniperus sp.).

Vieille usine de production de plaques photographiques pleine de grains d’argent? Vous avez essayé les fougères?
Les supers et hyperaccumulateurs verts qui réduisent la contamination des sols font passer la totalité des Avengers pour une bande de mous du genou.

La Phytoremédiation est assez nouvelle dans les méthodes et débats autour de la dépollution. Elle démarre dans les années 80 en Amérique puis plus tard en Europe et dans la dernière décennie en Asie. Elle a de sérieux avantages, comparé aux solutions classiques et que l’industrie étudie avec attention.

Elle dispose notamment de deux atouts qui peuvent peser lourd dans le pas de deux entre science, culture et politique que jouent les tenants de la conservation du patrimoine: son coût relativement réduit et son impact positif dans la communication autour du projet. Des sites comme Landschaftspark situé à Duisburg-Meiderich sont les exemples du succès de la mise en place de politiques de conservation de ce type.

La solution n’est pas miraculeuse: comme ses consœurs traditionnelles, elle est longue et limitée. Son action ne peut aller qu’aussi loin que la plante va. Ce qui est plus loin que l’on pense mais moins que l’on espère. Du moins pas encore.

Le processus a besoin de temps pour pousser!

Mais que nous préférons faire? Nous promener avec nos proches dans un ancien site industriel aux allures de jardin ou regarder une ruine grise et désolée de loin en lisant son histoire sur des panneaux entre deux mises en garde sur les dangers du lieu ?

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